Conflit entre associes au sein d’une holding : les limites des moyens de controle et d’information de l’associe minoritaire
Un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 15 février 2024 (n°23/10279) rappelle que l’associé minoritaire d’une holding dispose de différents moyens d’actions pour obtenir des informations et un contrôle sur la gestion de la société. Toutefois, pour les mettre en œuvre efficacement, il faut des circonstances précises.
Au cas particulier, la société holding (SAS) détenait une société de locations et de vente d’ambulances. Le minoritaire détenait 5% du capital de la holding et l’associé majoritaire (qui était aussi président de la société filiale) 65%.
Dans le cadre du conflit qui les opposait, le minoritaire a mis en œuvre différentes procédures : il a demandé la désignation d’un administrateur provisoire, il a demandé la communication d’information et il a demandé une expertise de gestion.
La demande de désignation d’un administrateur provisoire
Le tribunal de commerce peut, en référé, désigner un administrateur provisoire à la tête d’une société. L’administrateur provisoire a alors pour mission de remplacer le dirigeant et de gérer provisoirement la société, jusqu’à ce que le conflit entre les associés soit résolu.
Toutefois, l’associé minoritaire qui veut évincer le président minoritaire doit rapporter la preuve de circonstances (i) rendant impossible le fonctionnement normal de la société et (ii) qui la menace d’un péril imminent.
Dans cette affaire, le minoritaire ne rapportait la preuve d’un blocage du processus décisionnel au sein de la société ni d’un empêchement du fonctionnement normal de la société. Par ailleurs, les juges ont estimé que la plainte pour abus de biens sociaux qui avait été déposée par le minoritaire ne présentait pas d’éléments substantiels pour justifier la désignation d’un administrateur provisoire.
La demande de communication d’informations
Le minoritaire avait également demandé la communication, sous astreinte, de divers documents sociaux. Les juges ont rappelé qu’il n’existait aucune disposition légale qui fixait le droit de communication et d’information des associés dans les SAS. Il appartient aux statuts de la société de déterminer l’étendue du droit d’information qui peut (i) être le même que dans les sociétés anonymes, (ii) être plus étendu ou (iii) être plus restreint.
Au cas particulier, les magistrats ont estimé que le minoritaire avait reçu les informations prévues par les statuts et ont rejeté sa demande de communication d’information.
La demande de désignation d’un expert de gestion
L’article L 225-231 du Code de commerce prévoit une procédure particulière pour faire désigner un expert indépendant ayant pour mission d’établir si certains actes de gestions suspects sont ou non préjudiciables pour la société. Les actes de gestions en cause peuvent concerner à la fois la holding, mais également sa filiale.
Pour demander la désignation d’un expert, le minoritaire doit avoir préalablement adressé des questions écrites au président de la société sur les actes en cause. Le minoritaire ne pourra saisir le tribunal que s’il n’a pas reçu d’éléments de réponse dans le délai d’un mois ou si la réponse n’est pas satisfaisante.
Dans cette affaire, cette demande a également été rejetée, car le minoritaire ne caractérisait pas d’acte de gestion suspect.
Conseils
Les conflits entre associés peuvent donner lieu à de multiples procédures complexes et techniques. Il est nécessaire de bien les préparer en amont. Il est également nécessaire, pour les SAS, d’établir des statuts précis pour anticiper les difficultés avant l’apparition du conflit. Pour toute question relative à un conflit entre associés, n’hésitez pas à nous contacter.
Le cabinet LACOME D’ESTALENX MARQUIS intervient dans les domaines du droit des sociétés (corporate), des fusions-acquisitions et des opérations assimilées (opérations de haut de bilan notamment) ainsi qu’en contentieux des affaires. Nous conseillons des personnes physiques (chefs d’entreprises, cadres dirigeants, investisseurs, actionnaires …) et des entreprises françaises et étrangères, dans l’ensemble de leurs procédures précontentieuses et contentieuses ainsi que leurs procédures de voies d’exécution.
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