Cession de société : la responsabilité du vendeur pour faute de gestion de la société cédée

CESSION DE SOCIETE : LA RESPONSABILITE DU VENDEUR POUR FAUTE DE GESTION DE LA SOCIETE CEDEE

Après l’acquisition d’une société, il est fréquent que l’acquéreur découvre des fautes de gestion ou un passif dissimulés par le cédant. L’acquéreur, qui estime alors avoir été trompé quant à la véritable valeur de la société, dispose de plusieurs moyens d’action judiciaires, en particulier lorsque le cédant était également dirigeant de la société, comme l’illustre l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 25 janvier 2023 (n°21-20021).

Dans cette affaire, une société anonyme, spécialisée dans le tourisme et la création de voyages sur mesure, était détenue via une société holding et dirigée par les cédants puis avait été acquise par une société allemande.

L’acquéreur reprochait aux cédants (et anciens dirigeants), plusieurs éléments venant diminuer la valeur de la société acquise :

  • Le financement, pendant plusieurs années, et en pure perte, d’une filiale non rentable ;
  • Le fait d’avoir ignoré les revendications d’un salarié, exposant la société à un risque de procédure prud’homale ;
  • Le montant important des management fees versées par la société anonyme à la société holding.
  • Classiquement, l’acquéreur d’une entreprise qui estime avoir été trompé par le vendeur peut engager la responsabilité du cessionnaire sur les fondements :

  • De la garantie d’actif et de passif conclue au moment de la vente ;
  • Des vices cachés ;
  • Du dol.
  • Or, dans cette affaire, le protocole de cession de titres ne comportait aucune garantie d’actif et de passif. Le contrat mentionnait même les éléments reprochés par l’acquéreur. La veille de la signature du protocole de cession des titres, l’acquéreur avait même refusé d’inclure dans le périmètre d’acquisition la filiale qui avait été financée à perte, conscient du risque qu’il prenait.

    L’action initiée par l’acquéreur sur le fondement du dol n’a donc pas été retenue par les magistrats. En effet, le dol nécessite non seulement un élément matériel (une faute, un agissement créant un préjudice), mais également un élément intentionnel, à savoir la preuve de la volonté de nuire et de leurrer l’acquéreur de la société. Or, dans cette affaire, tous les éléments avaient bien été portés à sa connaissance.

    Dans sa décision, la Cour de cassation permet toutefois à l’acquéreur d’utiliser une autre procédure : une action pour faute de gestion initiée par la société cédée elle-même à l’encontre de ses anciens dirigeants (également cédant). Même si cette action profitera à la société cédée (et non pas à l’acquéreur allemand directement), elle aura pour effet de rehausser la valeur des titres acquis.

    Les faits reprochés aux cédants s’analysaient en effet comme des fautes de gestion : un abandon de créance, la poursuite déficitaire de l’exploitation d’une filiale, le manque de diligence du dirigeant exposant la société à un risque prud’homal ou encore des management fees sans réelles contreparties.

    L’absence de garantie d’actif et de passif dans le contrat de cession de titres n’exonère ainsi pas totalement le cédant s’il a également été dirigeant de la société : l’acquéreur dispose toujours de moyens judiciaires pour limiter sa perte.

    Pour toute question sur la préparation de la cession de votre entreprise ou vos difficultés post-acquisition, n’hésitez pas à nous contacter.

    Le cabinet LACOME D’ESTALENX MARQUIS intervient dans les domaines du droit des sociétés (corporate), des fusions-acquisitions et des opérations assimilées (opérations de haut de bilan notamment). Nous conseillons des personnes physiques (chefs d’entreprises, cadres dirigeants, investisseurs, actionnaires …) et des entreprises françaises et étrangères, dans l’ensemble des opérations de négociations en vue de l’achat et de la vente de sociétés, de cessions, de prises de participations, mais également de contentieux post-acquisition.

    Pour aller plus loin :

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